L’Argentine au banc des mauvais élèves

Salima Barragan

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«Les probabilités d’une restructuration sont élevées», affirme Sergey Goncharov de Vontobel Asset Management.

Inflation galopante de 54,5% en glissement annuel, effondrement du peso, renégociation de la dette avec le FMI; l’Argentine redevient-elle le mauvais élève, dont la restructuration de la dette il y a quatorze ans reste toujours bien ancrée dans les mémoires?  En pleine campagne présidentielle, le pays traverse une seconde crise de liquidités. Les marchés financiers et obligataires se sont effondrés. Dans un rapport, Vontobel Asset Management s’attend à davantage de nervosité jusqu’aux élections: «non à cause de l'incertitude quant au résultat des élections qui semble une affaire conclue, mais parce que l'orientation future de l'Argentine n'est pas claire».

Scénario de base revu

Fernández, un opposant socialiste au président Macri, a remporté par une très large majorité les élections primaires de mi-août. Suite à l’élimination surprise de Macri, le doute s’installe. La bourse de Buenos Aires s’effondre de 30% (dont 15% sur les valeurs bancaires), et le peso dégringole de 20% en l’espace de quelques semaines. Selon Sergey Goncharov de Vontobel AM, «Les marchés ont sur-réagi à la nouvelle». Afin de les rassurer, le nouveau ministre des finances Lacunza a déclaré, selon le Financial Times, que la situation actuelle est «due à des problèmes de liquidité à court terme et non de solvabilité de la dette». Mais cela n’a pas contenu la fuite des capitaux. Qui plus est, les agences de notation ont abaissé la note de crédit de l’Argentine au rang d’«obligation pourrie».

Une restructuration brutale n'est pas dans l'intérêt de l'Argentine
qui redeviendra la proie des «fonds vautours» comme en 2005.
Des plans d’attaque suffisants?

Pour calmer le jeu, Lacunza vient annoncer une série de plans dont le remboursement différé de certains emprunts à court terme, le réaménagement possible des dettes extérieures à long terme jusqu’à concurrence de 100 milliards de dollars ainsi qu’un retour au régime du contrôle des capitaux. Ces annonces ont entrainé une seconde correction de la bourse de Buenos Aires d’environ 11 % et du prix des obligations souveraines en devises locales, mais, dans une moindre mesure «En revanche, lors de l’annonce de ces mauvaises nouvelles, le marché n’a pas réagi avec une aussi grande amplitude compte tenu de la teneur des annonces», analyse Sergey Goncharov. «Le contrôle des capitaux impacte les marchés financiers car les investisseurs étrangers sont limités pour retirer leurs investissements, ce que les prix des actifs ont reflété», poursuit-il. Pour les sociétés, les restrictions de change sont moins contraignantes sur les opérations de change alors que pour la banque centrale d’Argentine, dont les liquidités se sont asséchées à un rythme effrayant, elles devenaient indispensables.

Vers une deuxième restructuration de la dette souveraine?

Une restructuration brutale n'est pas dans l'intérêt de l'Argentine qui redeviendra la proie des «fonds vautours» comme en 2005. Le spécialiste estime que les plans annoncés ne suffiront pas: «Les mesures actuelles sont suffisantes pour maintenir le gouvernement en place après les élections, mais elles ne règlent pas la question de la viabilité de la dette, et donc, à moins que la confiance des marchés ne soit rétablie d'ici là, il y a de grandes chances que la nouvelle administration doive procéder à une restructuration plus substantielle de la dette. Le cas échéant, il devrait faire intervenir le FMI, puisqu'il s'agit d'un prêteur important et de premier rang». En attendant, davantage de volatilité sur les marchés est attendue jusqu’au 27 octobre (date des élections) et au 10 décembre (date effective de la prise de pouvoir du prochain Président).

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