France: de «vrais» emplois pour soutenir la croissance

Bruno Cavalier, ODDO BHF

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Le plein emploi reste l’objectif lointain et il ne serait pas aberrant de revenir dans les deux ans à 7% de chômage.

©Keystone

La croissance de l’économie française à la mi-année (+0,3% t/t au deuxième trimestre) n’a rien de vraiment excitant dans l’absolu, mais comparée à celle des pays voisins, elle a de quoi faire des envieux. Sur la même période, le PIB réel a baissé en Allemagne (-0,1%), en Italie (-0,1%) et au Royaume-Uni (-0,2%), trois grands pays qui, de surcroît, présentent bien des fragilités à court terme. En France, la résistance de la demande tient beaucoup à l’amélioration du marché du travail. Les créations d’emploi du secteur privé ne faiblissent pas, les intentions d’embauche restent élevées et, par suite, les ménages se montrent moins inquiets du chômage.

Pour réduire le chômage de masse, il faut revoir le fonctionnement
du marché du travail et la formation de la main-d’œuvre.

«Dans la lutte contre le chômage, on a tout essayé»… C’est ainsi qu’il y a plus de vingt-cinq ans, un président de la République exprimait son impuissance ou sa résignation devant le problème du chômage, vu comme une sorte de fatalité. A l’époque, en 1993, le taux de chômage venait d’établir un nouveau record à plus de 10% de la population active. «Avoir tout essayé» signifiait, en général, pour le gouvernement d’avoir construit un système d’emplois subventionnés pour réduire le nombre de chômeurs, si possible avant les élections. Bien entendu, ce genre de systèmes n’a pas d’effet durable, est coûteux et risque de créer des trappes à chômeurs. Pour réduire le chômage de masse, mieux vaut attaquer le mal à sa racine, c’est-à-dire revoir le fonctionnement du marché du travail (protection de l’emploi, coût du travail) et la formation de la main-d’œuvre. Des cas aussi différents que le Royaume-Uni ou l’Allemagne montrent en tout cas que rétablir le plein-emploi est chose possible.

Côté entreprises, le climat de l’emploi est en zone d’expansion.

La réforme Pénicaud de 2017, s’inscrivant dans le prolongement de la réforme El Khomri de 2016, a modifié le code du travail dans ce but. Ces réformes ont été passées à un moment où, de surcroît, l’économie sortait de la torpeur où l’avaient plongé la Grande récession de 2007-2009 et la rechute de 2011-2012. Que la cause en soit cyclique ou structurelle, peu importe, le fait est que le chômage se replie depuis quatre ans. Le pic était à 10,5% en 2015, on était à 8,5% au deuxième trimestre 2019, et la tendance reste baissière. Sur cette période, le rebond de l’emploi a été tiré par le seul secteur privé, qui représente les trois quarts de l’emploi salarié, alors que l’emploi public était presque stagnant (premier graphique ci-dessous). On note aussi une nette reprise des embauches en contrats «longs» (second graphique ci-dessous). L’intérim a baissé tout au long de 2018, jouant son rôle de variable d’ajustement lors d’un ralentissement, mais paraît à peu près stabilisé au premier semestre 2019. Côté entreprises, le climat de l’emploi est en zone d’expansion. Côté ménages, les craintes de chômage sont à un bas niveau historique. Le plein emploi reste un objectif lointain, mais il n’est pas déraisonnable dans les deux ans de revenir au précédent point bas du chômage qui était à 7-7,5% avant la crise.


 

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