Digitaliser pour personnaliser

Yves Hulmann

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Julius Baer mise sur un nouvel outil afin de réduire la charge administrative de ses conseillers. Comment contrer la tendance à la «commoditization».

La transformation technologique et la complexification de la réglementation sont deux défis clés pour les gérants de fortune. Pour y faire face, Julius Baer mise sur sa propre solution, développée en grande partie à l’interne, baptisée «Digital Advisory Suite». Ce nouvel outil doit permettre de réduire la durée de l’exécution d’une transaction bancaire, pouvant nécessiter jusqu’à 40 minutes actuellement, à 4 minutes seulement, a souligné la banque lors d’une présentation consacrée au thème de la numérisation devant les médias vendredi à Zurich.

Eviter la «commoditization» des services bancaires

Comme le résume Nic Dreckmann, directeur opérationnel («chief operating officer») chez Julius Baer, le secteur de la gestion de fortune est mis sous pression par plusieurs facteurs. En premier lieu, l’augmentation de la pression réglementaire, notamment avec l’application des réglementations MiFid en Europe et LSFin en Suisse. Ensuite, l’érosion des marges, sous l’effet de la concurrence croissante de produits et de solutions de gestion à faibles coûts.  Enfin, en raison de l’arrivée sur le marché de nouveaux concurrents, comme les solutions en grande partie automatisées proposées par les conseillers robots. «Les robo-advisors tuent le conseil personnalisé», estime le spécialiste, qui observe aussi une tendance à une «commoditization» toujours plus prononcée des services bancaires dans la gestion de fortune.

«S’il y a toujours davantage de solutions standardisées
sur le marché, nous faisons le contraire.»

Pour y remédier, l’établissement zurichois a élaboré son propre outil de conseil appelé «Digital Advisory Suite» (DiAS). Cette solution permet à un conseiller à la clientèle d’avoir accès sur une seule plateforme à l’ensemble des données relatives à ses clients, de pouvoir leur soumettre des idées d’investissement - et de recueillir leur réaction envers celles-ci – et aussi d’évaluer l’adéquation des propositions de placements avec le profil du client et des autres investissements figurant déjà dans son portefeuille.

Du «sur-mesure numérique»

Un peu à l’image de ce qui se pratique dans le commerce en ligne, le nouvel outil effectue des propositions d’investissements à un client en fonction de ses choix précédents ou d’après ce qui l’a intéressé ou non. Les idées d’investissement sont présentées sous une forme adéquate en fonction du type d’appareil utilisé par le client, non pas seulement sous la forme d’un document PDF caché au fonds d’un site Internet. «C’est un peu comme chez Amazon, le système analyse pourquoi telle ou telle idée d’investissement a eu du succès ou auprès des clients», illustre Nicolas de Skowronski, directeur Advisory Solutions chez Julius Baer. «S’il y a toujours davantage de solutions standardisées sur le marché, nous faisons le contraire. Nous voulons apporter toujours plus de solutions sur-mesure aux clients, en combinant un conseil personnalisé et des outils numériques servant au support», poursuit-il.

Les clients veulent avoir un interlocuteur

Le lancement de la nouvelle «Digital Advisory Suite» sert-il aussi à se protéger contre la concurrence croissante émanant des nouvelles offres bancaires à faibles coûts des «smartphone banks», à l’exemple de Revolut ou de N26, ou celles des conseillers robots? Nicolas de Skowronski estime qu’il faut ici distinguer entre les différents segments de clientèle: «Dans la banque de détail, la différence se fait au niveau des économies d’échelle. Dans la banque privée, d’autres règles s’appliquent. Nous jouons dans une ligue différente», relativise-t-il.

Quant à la concurrence émanant des «robo-advisors», les experts de Julius Baer estiment que l’on devrait plutôt parler de «robo-discretionary», ces plateformes n’apportant pas vraiment de conseil à leurs clients. «Le client d’un robo-advisor qui a vu la valeur de ses placements fondre le 24 décembre dernier n’avait personne à qui s’adresser pour discuter de qu’il devait faire. Les clients veulent toujours avoir accès à un conseiller dans les phases difficiles», affirme Nic Dreckmann.

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