Comment expliquer le ralentissement de milieu de cycle?

Peter van der Welle, Robeco

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La croissance économique est à la peine, mais devrait reprendre des couleurs.

L’activité mondiale est confrontée à un ralentissement persistant, qui touche essentiellement le secteur manufacturier, dans un contexte d’incertitude généralisée. En août, l’indice ISM, baromètre de la confiance du secteur manufacturier, a reculé à 49,1, dénotant une contraction qui n’a guère rassuré les investisseurs.

Faut-il y voir un signe annonciateur d’un marasme de fin de cycle? L’économie subit un ralentissement de milieu de cycle, mais devrait reprendre des couleurs en fin d’année 2019. L’essoufflement du secteur manufacturier, notamment dans l’automobile, entrave la croissance mondiale, mais sans ne l’anéantira pas.

Le déstockage comme baromètre

Un ralentissement de milieu de cycle se caractérise généralement par une réduction du stock de produits détenus par les entreprises, qui estiment que la demande va baisser, ce qui perturbe le cycle des stocks. Actuellement, il y a une tendance qui ressemble à un ralentissement de milieu de cycle: la production industrielle se contracte et le ratio stocks/ventes se situe à 1,45 aux États-Unis, un niveau proche des points hauts de 1995 (1,44) et 2016 (1,47).

Le ralentissement du cycle des stocks a coïncidé
historiquement avec un ralentissement plus général.

Cette similitude est de nature rassurante. Cependant, le ralentissement du cycle des stocks a, aussi coïncidé historiquement avec un ralentissement plus général qui a fini par mettre fin à l’expansion, comme en 2001. L’essoufflement du cycle des stocks est donc une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour établir si nous nous sommes confrontés à un ralentissement de milieu de cycle ou un marasme de fin de cycle. 

Décalage par rapport à l’inversion de la courbe des taux

D’autant que, selon certains indicateurs, le pire reste à venir, notamment avec l’inversion de la courbe de rendement des bons du Trésor américain, signe avant-coureur classique d’une récession. Mais, le temps qui s’écoule entre l’inversion de la courbe et l’entrée effective en récession n’est pas toujours le même.   

De l’avis général, l’économie entre en récession 18 mois après l’inversion de la courbe des taux. Cela signifierait donc que nous sommes en fin de cycle. Or des travaux menés par le FMI révèlent que la probabilité de prédire une récession très en amont est infime: les économistes n’y sont parvenus que cinq fois sur 153.

Les deux cycles économiques qui ont précédé le cycle actuel ont d’ailleurs apporté la preuve de cet allongement du délai entre inversion et récession: 29 mois après l’inversion de 2005, et 33 mois en 1998.

Décalage par rapport à l’indice manufacturier

Des indices tendent également à montrer que le délai entre le point haut de l’indice ISM manufacturier américain et le début de la récession s’allonge. Ce décalage a très largement dépassé la moyenne historique de 36 mois lors des trois derniers cycles, puisqu’il a atteint 80, 78 et 44 mois.

Le secteur des services est monté en puissance
et représente aujourd’hui 45% du PIB américain. 

L’allongement des délais entre inversion des courbes, baisse de moral des producteurs et récessions suggère que l’expansion actuelle a encore de beaux jours devant elle.

Le poids de moins en moins important du secteur manufacturier dans le cycle économique mondial constitue l’explication la plus plausible à cet allongement des délais. En même temps, le secteur des services est monté en puissance et représente aujourd’hui 45% du PIB américain. 

Le secteur manufacturier se trouve d’ores et déjà en phase de contraction, alors que les services résistent: l’indice ISM non manufacturier annonce toujours une expansion dans le secteur tertiaire américain. Difficile d’envisager une récession aux États-Unis tant que le secteur des services ne montre pas de signes de contraction.

Des taux directeurs réels favorables 

Par ailleurs, les taux directeurs réels actuels sont très différents de ceux que l’on observe généralement en fin de cycle de resserrement de la Fed. Aux États-Unis, les taux directeurs réels sont inférieurs à 1% voire négatifs, alors que les taux d’intérêt réels sont supérieurs à 2% en fin de cycle de durcissement monétaire. 

La faiblesse actuelle des taux directeurs
devrait prolonger l’expansion économique.

Sauf à penser que le taux d’intérêt neutre est inférieur aux taux directeurs réels qui prévalent aujourd’hui dans les économies avancées, la faiblesse actuelle des taux directeurs devrait donc prolonger l’expansion économique.

Les États-Unis n’ont jamais connu de récession sans que les taux d’intérêt réels ne dépassent leur tendance à long terme d’au moins 2%, et ils sont aujourd’hui à 0,96%. Les taux d’intérêt réels qui résultent du cycle de resserrement amorcé par la Fed en décembre 2015 ne sont probablement pas suffisamment punitifs pour porter un coup d’arrêt à l’économie américaine.

Le rôle de l’investissement

L’investissement semble, influencer les cycles économiques. On s’aperçoit que la dynamique d’investissement des entreprises américaines est toujours positive, alors qu’elle marque généralement le pas avant une récession. 

Par conséquent, si la tendance actuelle est bel et bien un ralentissement de milieu de cycle, le risque est réduit pour les actions. Toutefois Il faut rester prudent, car ce passage à vide pourrait encore durer un certain temps. Pour l’heure, le choix de sous-pondérer les actions internationales, attendant le bon moment pour augmenter l’exposition et atteindre la surpondération d’ici à la fin de l’année, se pose.

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