Biélorussie: les raisons d’investir

Vincenzo Trani, Mikro Kapital Group

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Malgré ses difficultés, l’économie biélorusse devrait être en mesure de progresser, car elle bénéficie d’une amélioration de sa position extérieure.

©Keystone

La Biélorussie a enregistré l’année passée une croissance de 3% de son PIB, contre 2,5% en 2017. La hausse des cours du pétrole ainsi que la vigueur de la demande extérieure ont soutenu les exportations, tandis que la demande intérieure était stimulée par une croissance à deux chiffres des salaires. 

Une politique monétaire prudente, le maintien du taux directeurs aux alentours de 10% depuis la mi-2018, ainsi que l’amélioration de la crédibilité la banque centrale, la Banque nationale de la République de Biélorussie (BNRB), ont permis de garder l'inflation à un niveau historiquement bas, de l’ordre de 5% en 2018. 

Le déficit des transactions courantes de la Biélorussie
est revenu à 0,4% du PIB l'année passée, contre 1,7% en 2017.

La vigueur de la demande extérieure, l'amélioration des termes de l'échange ainsi qu’une redistribution plus importante que prévu des taxes d'importation au sein de l'Union économique eurasiatique (UEEA) ont stimulé les recettes budgétaires. Toutefois, les dépenses ont augmenté plus rapidement encore, tant du côté des biens d’investissement que de celui des salaires, si bien que le déficit budgétaire s’est établi à 1,3% du PIB en 2018, contre 0,3% en 2017.

Le déficit des transactions courantes de la Biélorussie est, quant à lui, revenu à 0,4% du PIB l'année passée, contre 1,7% en 2017. Le solde des échanges de marchandises s'est légèrement amélioré, en raison de la hausse des cours de la potasse et du pétrole. Et, globalement, l'amélioration de la balance des opérations courantes s'explique principalement par l’accroissement des revenus secondaires (à 2,4% du PIB), ainsi que par l’augmentation des exportations des secteurs des technologies de l’information et du transport. A ce propos, il convient de souligner que l’industrie des technologies de l’information a été celle dont les exportations ont connu la progression la plus rapide et la plus régulière ces cinq dernières années. L’an passé, ses recettes d’exportation ont franchi la barre du milliard de dollars.

La Biélorussie reste malgré tout un pays dans lequel l’emprise de l’Etat reste très importante. Selon Belstat, à fin 2018, près de 50% des actifs étaient employés au sein d’entreprises contrôlées par l’Etat, lesquelles fournissaient environ les trois quarts de la production industrielle totale du pays et généraient près de 60% des revenus dégagés par les entreprises. Par conséquent, si l’aide extérieure venait à diminuer, entraînant une réduction du soutien de l’Etat, bon nombre d’entreprises publiques pourraient en pâtir, ce qui se répercuterait sur le profil de crédit de l’Etat. 

Depuis la crise de 2014-2015,
l’Etat a considérablement réduit son emprise.

En 2017, le soutien direct de l’Etat aux entreprises représentait près de 15% du total de ses dépenses budgétaires consolidées et 4 à 5% de son PIB annuel. Cependant, depuis la crise de 2014-2015, l’Etat a considérablement réduit son emprise, que ce soit au travers du resserrement budgétaire, de la réduction et de la réglementation de ses prêts, de la régularisation de sa politique monétaire, du renforcement des contraintes budgétaires auxquelles sont soumises les entreprises publiques ou encore par ses efforts pour améliorer le climat des affaires pour le secteur privé. Affirmer que la Biélorussie reste une économie planifiée serait donc aujourd’hui totalement erroné, même s’il reste encore un long chemin à parcourir pour réduire l’inefficience du secteur public.

L’année 2019 a démarré lentement, mais la croissance du PIB de la Biélorussie s’est nettement accélérée au deuxième trimestre, dopée, en premier lieu, par la construction. Il est cependant intéressant de souligner que cette reprise de la croissance s’est produite dans un contexte de resserrement du crédit bancaire et de freinage des dépenses budgétaires. Cette situation devant rester inchangée à court terme, il paraît donc peu probable que la croissance puisse se maintenir au rythme qu’elle a connu récemment. 

Ces dernières années, la Biélorussie est parvenue à capitaliser davantage sur son rôle de place de transit. En effet, le «One Belt One Road» chinois passe également par la Biélorussie, et l'assouplissement du régime des visas en 2017 a contribué à stimuler le tourisme provenant de l’étranger ainsi que le transport de passagers.

Le marché des euro-obligations s’est montré assez peu sensible
aux frictions actuelles entre Moscou et Minsk.

Le facteur clé reste néanmoins le transfert d'énergie de la Russie vers la Biélorussie, ce dernier contribuant à hauteur de 4,7% au PIB du pays en 2018. A l’heure actuelle, la modification de taxation des hydrocarbures introduite par la Russie constitue le principal point de discorde entre les deux pays, la Biélorussie étant en attente d’indemnisations. 

Mais ces vingt dernières années, Moscou et Minsk ont connu plusieurs épisodes de négociations commerciales difficiles (elles ont notamment porté sur le prix du gaz et sur les taxes à l’exportation du pétrole brut russe). Compte tenu de cet historique, le marché des euro-obligations s’est montré assez peu sensible aux frictions actuelles, les investisseurs supposant qu'en fin de compte, une solution sera trouvée une fois encore pour que la Russie continue d’une manière ou d’une autre à assurer son soutien financier à la Biélorussie.

Quoiqu’il en soit, l’amélioration de la position extérieure de la Biélorussie devrait lui servir d’amortisseur. Et compte tenu de la réduction du déficit et l’accès facilité des entreprises à des financements externes, l’économie du pays devrait être à même de surmonter ses difficultés.

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