BCE: revue stratégique en attendant l’évolution de l’inflation

William De Vijlder, BNP Paribas

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A en juger par la réaction des marchés, la conférence de presse de la présidente de la BCE cette semaine n’a pas été un événement majeur.

La BCE reste prudente dans son évaluation de la situation économique, soulignant que les risques restent orientés à la baisse, mais moins qu’auparavant en raison de l’accord commercial entre les États-Unis et la Chine. Le message est légèrement meilleur concernant l’inflation sous-jacente qui, d’après certains signes, enregistre une augmentation modérée. D’ici à la fin de l’année, la revue stratégique, qui a désormais été lancée, retiendra toute l’attention des marchés, qui se demandent si elle pourrait influencer l’orientation de la politique monétaire. Ce réexamen de la stratégie est également important du point de vue du changement climatique: les opérations de politique monétaire vont-elles l’intégrer parmi les facteurs de risque ou l’ambition ira-t-elle au-delà?

A en juger par la réaction des marchés, la conférence de presse de la présidente de la BCE cette semaine n’a pas été un événement majeur. L’indice Euro Stoxx 50 a oscillé dans une fourchette étroite d’environ 0,15% et les rendements du Bund 10 ans se sont détendus d’environ un point de base. Cette absence de volatilité n’a rien d’étonnant. Premièrement, la politique monétaire devrait rester inchangée pendant une longue période et, deuxièmement, le message sur la situation économique reste prudent. Lors de la réunion de décembre, la BCE notait que: «les données économiques et les résultats d’enquête les plus récents, s’ils restent globalement faibles, indiquent une certaine stabilisation du ralentissement de la croissance économique dans la zone euro». À présent, le message est le suivant: «Les données économiques et les résultats des enquêtes indiquent une certaine stabilisation de la dynamique de la croissance dans la zone euro, la croissance à court terme devant rester proche des niveaux observés au cours des trimestres précédents». Le changement d’appréciation est minime – le passage « s’ils restent globalement faibles» a été supprimé – pour autant, et il est important de le souligner, aucun rebond de la croissance n’est attendu à court terme. De plus, les risques restent orientés à la baisse même s’ils sont désormais moins prononcés depuis la diminution de l’incertitude entourant les échanges commerciaux. Le Conseil des gouverneurs va, bien entendu, se féliciter que «certains signes d’une légère accélération de l’inflation sous-jacente sont apparus, conformément aux anticipations». Il n’empêche que les perspectives d’inflation restent moroses.

Compte tenu d’une politique monétaire enfermée dans une forward guidance liée à l’état de l’économie et de l’évolution très lente des données, l’attention se reporte sur la revue stratégique qui a été officiellement lancée, un vaste chantier à la hauteur de l’importance de l’exercice. La question-clé qui se pose est de savoir si le mandat de la BCE, tout en restant étroit – à savoir le maintien de la stabilité des prix – sera reformulé. L’une des possibilités serait de le rendre explicitement symétrique. Cela impliquerait la suppression du terme « inférieur » dans ce passage largement cité « Nous prévoyons qu’ils [les taux d’intérêt directeurs] resteront à leurs niveaux actuels ou à des niveaux plus bas, jusqu’à ce que nous ayons constaté que les perspectives d’inflation convergent durablement vers un niveau suffisamment proche de, mais inférieur à 2 % ».

La décision aurait un impact significatif sur les anticipations de taux directeurs et ferait avancer la date du premier relèvement attendu des taux. L’enjeu pour l’institution est également d’examiner comment intégrer le défi climatique dans la politique monétaire. Le nombre impressionnant de questions sur le changement climatique, au cours de la conférence de presse, est en partie lié à l’ambition exprimée par la présidente de la BCE dans ses déclarations récentes et devant le Parlement européen. Ces nombreuses questions traduisent aussi l’impatience de voir jusqu’où ira le mandat : un contrôle des risques dans le cadre de la stabilité financière ou quelque chose de plus ambitieux s’inscrivant dans le cadre des décisions de politique monétaire, comme le pilotage de la valorisation relative des actifs financiers – actifs « verts » versus autres actifs – ou l’exercice d’une influence sur l’orientation des flux de crédit? 

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