Après Draghi, Lagarde

Salima Barragan

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Selon Andrew Wilson de Goldman Sachs AM, la politique monétaire de Christine Lagarde ne devrait pas s'écarter de celle de Draghi.

Une page de l'histoire se tourne avec la fin de la présidence de Mario Draghi et son approche unique de l'élaboration des politiques qui, comme il l'a illustré lors de sa dernière réunion, contient souvent quelques surprises. Il laissera à sa successeur, Christine Lagarde, des tâches délicates. Elle devra veiller à la cohésion du Directoire de la BCE, au sein duquel certaines divergences sur le taux directeur négatif ont été soulevées. Lagarde hérite d'une position déjà ultra accommodante, suggérant une marge de manœuvre limitée pour un assouplissement supplémentaire. La politique monétaire de l'ancienne cheffe du FMI va-t-elle suivre les mêmes lignes que celle de Draghi? Pour Andrew Wilson, CEO de Goldman Sachs Asset Management pour la région EMEA, au moins à court terme, le président Lagarde assurera la continuité avec la politique actuelle de la BCE.  

UNE POLITIQUE TRACéE

Cette années, l'économie de la zone euro devrait croître de 1,1% selon les estimations de Goldman Sachs Asset Management et l'inflation devrait rester bien en deçà de l'objectif de la BCE. Andrew Wilson ne prévoit pas d'écart significatif par rapport à l'orientation actuelle de la politique monétaire dévoilée lors de l'avant-dernière réunion de Draghi: «Une nouvelle baisse du taux directeur ne peut être exclue, mais elle nécessiterait une détérioration significative de la situation économique actuelle, compte tenu des inquiétudes suscitées par l'impact négatif sur le secteur financier européen et des opinions divergentes du Conseil de la BCE».  Sortir de la spirale des taux d'intérêt négatifs sera son plus grand défi car le mandat de la BCE est très clair sur son objectif d'inflation: «En l'absence d'une convergence forte de l'inflation vers 2%, il sera difficile de justifier une hausse des taux», estime Andrew Wilson.

«Un soutien budgétaire significatif pourrait nous amener
à revoir à la hausse nos perspectives de croissance.»

Les données macroéconomiques - sans être particulièrement réjouissantes - restent stables. «L'impact net du faible secteur manufacturier combiné à une croissance robuste de celui des services débouche sur une croissance globale stable, quoique à un rythme plus modeste. L'évolution du marché du travail mérite une attention particulière, étant donné que le faible taux de chômage a fait de la consommation des ménages l'un des principaux piliers de la croissance récente», déclare Andrew Wilson. «Un soutien budgétaire significatif pourrait nous amener à revoir à la hausse nos perspectives de croissance, mais le discours reste inchangé; les pays capables de fournir des mesures de relance budgétaire ne sont pas disposés à le faire et ceux qui sont disposés à approuver la politique budgétaire ne le sont plus en raison des niveaux déjà élevés de la dette», poursuit-il.

Au cours de ses derniers jours à la BCE, M. Draghi a appelé les gouvernements à utiliser la politique budgétaire pour soutenir l'économie. Il s'agit d'une déclaration forte étant donné que la BCE n'a pas d'influence directe sur la politique budgétaire. Le style de communication de Lagarde sera-t-il différent de celui de Draghi? «Il est intéressant de noter qu'elle a utilisé son premier discours en tant que présidente de la BCE pour faire écho à l'appel de M. Draghi en faveur d'un nouveau 'policy mix' qui inclurait un soutien budgétaire», répond Andrew Wilson.

AUGMENTER LES RISQUES

Les détenteurs d'obligations garderont un excellent souvenir de 2019; la politique conciliante de la banque centrale européenne aidant à soutenir les rendements. Bien que des risques à la baisse demeurent à l'approche de 2020, Goldman Sachs Asset Management continue d'identifier des opportunités dans le domaine de la dette d'entreprise. «Les investisseurs continuent d'exiger un rendement, mais l'incertitude élevée a entraîné une préférence pour des obligations de meilleure qualité. Cela a créé des opportunités dans des segments de marché de moindre qualité où la solidité des fondamentaux est en contradiction avec les valorisations actuelles. En l'absence d'un retournement du cycle américain, nous ne voyons pas de catalyseur pour un élargissement significatif des écarts», explique Andrew Wilson, qui voit également de la valeur dans certaines poches du marché européen des titres de créances d'entreprises où de nombreuses sociétés présentent des bilans solides et des ratios de couverture des intérêts élevés.

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