Moscou prêt au bras de fer pétrolier avec Ryad

AWP

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Le Russie se dit prête à faire face à la plongée des cours du brut et à soutenir sa monnaie.

Forte de ses réserves financières, la Russie a affiché sa fermeté lundi dans le bras de fer entamé avec Ryad, se disant prête à faire face à la plongée des cours du brut et à soutenir sa monnaie.

Lundi matin, le rouble est tombé à son plus bas niveau depuis quatre ans tandis que les marchés boursiers du monde entier dégringolaient, affolés par une chute historique du cours du pétrole et par la perspective d’une débâcle économique généralisée liée à l’épidémie du nouveau coronavirus.

La décision unilatérale de Ryad de baisser ses prix à la livraison, devant le refus russe d’instaurer de nouveaux quotas, a fait plonger un prix du baril qui était déjà à un niveau particulièrement faible en raison du virus Covid-19. Vers 13H00 GMT, le baril de Brent s’échangeait autour des 35 dollars.

Lors d’une réunion du gouvernement lundi, le ministre de l’Energie Alexandre Novak a affirmé que le scénario actuel avait été prévu. «L’industrie pétrolière russe dispose d’une base de ressources de haute qualité et d’une marge financière suffisante pour rester compétitif à tout niveau de prix, ainsi que pour maintenir sa part de marché», a-t-il déclaré.

Selon le ministère des Finances, la Russie a accumulé suffisamment de réserves pour faire front: le fonds souverain détient 150 milliards de dollars, soit 9,2% du PIB, ce qui lui permettrait de tenir entre 6 et 10 ans si les prix du pétrole chutent à 25-30 dollars par baril.

Le ministère des Finances et la Banque centrale ont eux annoncé des mesures de soutien du rouble.

Contrairement à la guerre des prix du pétrole de 2016 - lorsque le baril était passé sous la barre des 30 dollars - «la Russie est dans une bien meilleure position financière» et le rapport de force est à son avantage face à l’Arabie saoudite, estime l’analyste Chris Weafer, fondateur de la société de conseil Macro Advisory.

Selon lui, la Russie aurait désormais 80 milliards de dollars de réserves de plus que l’Arabie saoudite, qui a «entamé ses fonds pour financer le déficit budgétaire et les projets de développement ambitieux du prince héritier».

La Russie a également une devise plus flexible que celle du royaume, dont le ryal est ancré au dollar.

«Il est donc peu probable que Moscou flanche en premier, certainement pas pendant encore 3 à 6 mois», indique Chris Weafer.

«flancher le premier»

Le refus de Moscou d’une nouvelle réduction de la production de brut dans le cadre de l’accord avec l’Opep pourrait avoir sonné le glas de son rapprochement avec le cartel, et notamment avec Ryad, débuté fin 2016 et qui a permis à la Russie de s’affirmer sur le terrain énergétique par rapport aux Etats-Unis.

Le secteur pétrolier russe, de plus en plus critique vis-à-vis de l’effort consenti, est à l’origine de la décision de Moscou. En particulier, le puissant patron du géant pétrolier Rosneft, Igor Setchine, a multiplié les mises en garde contre la perte de terrain face aux Etats-Unis, qui inonde le marché avec son pétrole de schiste.

«L’objectif des Russes est de mettre sous pression l’industrie pétrolière américaine», a noté Warren Patterson, analyste de la banque ING. «Mais si ça peut marcher sur le moyen terme, l’impact sur le long terme est plus incertain».

«Quand l’Opep a essayé la dernière fois, l’industrie du pétrole américain a rebondi, encore plus forte et efficace qu’auparavant», a-t-il ajouté.

La position russe pourrait rapidement évoluer si le prix du pétrole passe sous la barre des 25 dollars et y reste pendant trop longtemps.

Le président Vladimir Poutine pourrait rechigner à trop puiser dans les réserves, alors qu’il met en place un plan d’investissements de 25.700 milliards de roubles (300 milliards d’euros au taux actuel) pour relancer l’économie du pays.

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