Le FMI maintient ses prévisions mondiales

AWP

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Le Fonds monétaire international a, en revanche, revu à la hausse sa prévision de croissance pour la zone euro.

Les tensions commerciales pourraient faire «dérailler» après 2020 la solide croissance mondiale, actuellement portée par les Etats-Unis, l’Europe et les pays émergents, a prévenu mardi le Fonds monétaire international en prélude de ses réunions de printemps.

Après avoir progressé de 3,8% en 2017, le produit intérieur brut (PIB) mondial devrait accélérer à 3,9% en 2018 et en 2019, soit un rythme inchangé par rapport aux précédentes prévisions de janvier, a annoncé le FMI.

Près de dix ans après le début de la récession mondiale, l’économie de la planète évolue dans une bonne dynamique grâce aux échanges de biens et de services dont le volume devrait s’accroître de 5,1% cette année après 4,9% en 2017.

Pour 2018, les prévisions ont même encore été relevées pour les Etats-Unis (2,9%) dopés par leur réforme fiscale, pour les pays de la zone euro (2,4%) dont la France qui a engagé des réformes, l’Italie et l’Espagne ainsi que pour le Brésil (2,3%) qui conforte sa sortie de récession.

Le FMI note en outre la performance solide du Japon et de la Chine avec des prévisions de croissance respectives de 1,2% et 6,6% tandis que l’Inde va elle aussi contribuer au dynamisme mondial (+7,4%).

Mais «avec cette toile de fond positive, les perspectives d’un conflit sur le commerce dénotent», a commenté le chef économiste du FMI, Maurice Obsfeld, lors d’une conférence de presse.

Confiance minée?

Depuis mars, les Etats-Unis ont multiplié des mesures protectionnistes. Après avoir imposé le 8 mars des droits de douane de 25% sur les importations d’acier et de 10% sur celles d’aluminium, l’administration Trump a dressé une liste provisoire de produits chinois représentant 50 milliards d’importations susceptibles d’être soumis à leur tour à de nouvelles taxes américaines pour compenser des pratiques commerciales jugées «déloyales».

A Washington qui l’accuse d’imposer un «transfert forcé de technologies américaines» et de «vol de propriété intellectuelle», le géant asiatique a rétorqué avec des représailles dans des proportions identiques visant les produits américains, ce qui a poussé le président américain Donald Trump à surenchérir en menaçant de viser pour 150 milliards de dollars d’importations chinoises.

«A ce stade, bien que des coups de semonce aient été tirés, il s’agit davantage d’une +drôle de guerre+», a réagi Maurice Obstfeld car les mesures n’ont été mises en oeuvre ni d’un côté, ni de l’autre.

Pour autant, cette politique protectionniste risque de «miner la confiance» et «faire dérailler prématurément la croissance mondiale», a-t-il reconnu.

Si l’économiste s’est refusé à ce stade à avancer dans quelle mesure la croissance pourrait être affectée, il a souligné que l’incertitude liée à ces tensions commerciales était de nature à freiner les investissements et à tirer vers le bas les marchés boursiers.

Multiples risques persistants

Le libre-échange a non seulement contribué à une solide expansion des économies avancées mais encore a permis aux pays émergents et aux pays pauvres «de faire d’incroyables avancées en matière d’éradication de la pauvreté», a également argué Maurice Obstfeld, exhortant les pays à s’engager dans une voie consensuelle pour résoudre leurs différends.

Maurice Obstfeld a souligné qu’une guerre commerciale ne ferait que des perdants, se référant aux années 1930 lorsque le sénateur américain Reed Smoot avait relevé les barrières douanières sur des milliers de produits, provoquant une dégringolade des échanges internationaux. Ces taxes avaient non seulement effacé la plus grande partie des bénéfices tirés de la mondialisation mais encore aggravé la Grande Dépression.

A court terme, les risques pour la croissance sont plutôt limités, estime néanmoins le FMI mais au-delà du commerce, une série de menaces persistent à plus long terme.

«Les économies avancées se heurtent au vieillissement de la population, à la diminution du taux de participation au marché du travail et à une faible croissance de la productivité», a notamment résumé l’économiste du FMI. Aux Etats-Unis, le stimulus lié à la réforme fiscale va en outre finir par s’estomper.

Le FMI note également que les pays exportateurs de matières premières doivent diversifier leurs économies s’ils veulent accroître leur expansion et leur capacité de résistance en cas de crise. Enfin, les risques géopolitiques ne devraient pas non plus être sous-estimés.

«Le tableau général est actuellement lumineux. Mais nous pouvons voir des nuages plus sombres pointer à l’horizon», a elle-même résumé la directrice générale du FMI Christine Lagarde la semaine dernière.

 

Croissance revue à la hausse en Zone euro
Le Fonds monétaire international a légèrement revu à la hausse mardi sa prévision de croissance pour la zone euro en 2018 en raison notamment d’une demande plus forte qu’attendu.
Le FMI s’attend, dans ses prévisions de printemps, à une croissance de 2,4% en 2018 (+0,2 point par rapport à la dernière prévision de janvier) et de 2,0% en 2019 (inchangé par rapport à janvier).
Dans le détail, l’institution rehausse sa prévision de croissance 2018 pour l’Allemagne (2,5%, +0,2 point), la France (2,1%, +0,2), l’Italie (1,5%, +0,1) et l’Espagne (2,8%, +0,4).
Ces prévisions reflètent «une demande intérieure plus forte que prévu dans l’ensemble de l’union monétaire, une politique monétaire accommodante et l’amélioration des perspectives de la demande extérieure», détaille le FMI.
L’institution basée à Washington estime que cette politique monétaire favorable doit perdurer «jusqu’à ce que l’inflation augmente durablement» vers la cible de 2,0% fixée par la Banque centrale européenne (BCE).
Elle prévoit une inflation de 1,5% en 2018 et de 1,6% en 2019 pour la zone euro.
A moyen terme, le FMI reste prudent et anticipe une croissance à 1,4%, en raison d’une «faible productivité, dans un contexte de faibles efforts de réformes et d’une démographie défavorable».
L’institution insiste sur la nécessité de réduire les prêts non performants («non performing loans» ou NPL) afin «d’effacer les héritages de la crise», mais aussi de conclure l’union bancaire, qui reste pour elle «une priorité».
Le FMI constate que les réformes structurelles à ses yeux nécessaires dans la zone euro varient selon les pays, l’Espagne devant par exemple se concentrer sur le marché du travail, l’Italie sur les accords salariaux et l’Allemagne sur la déréglementation des services.
Hors zone euro, le Royaume-Uni, amené à quitter l’Union européenne dans un an, voit lui aussi sa perspective de croissance augmenter légèrement cette année, à 1,6% (+0,1).
La croissance britannique pourrait ensuite ralentir à 1,5% en 2019, car les investissements des entreprises devraient «demeurer faibles, compte tenu de l’incertitude accrue» liée au Brexit.
A moyen terme, le FMI anticipe pour le Royaume-Uni une croissance de 1,6%, «reflétant l’augmentation attendue des obstacles au commerce et la baisse des investissements directs étrangers à la suite du Brexit».

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