Le dollar emporte tout sur son passage, dans un marché tourneboulé

AWP

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Le billet vert a fait brièvement descendre l’euro sous 1,05 dollar et atteint son plus haut niveau depuis près de deux ans face à la livre sterling, frôlant également la parité avec le franc.

Le dollar prenait nettement l’avantage jeudi sur toutes les grandes devises, soutenu par le durcissement monétaire de la banque centrale américaine (Fed), après une première réaction trompeuse mercredi aux annonces de la Fed.

Le billet vert a fait brièvement descendre l’euro sous 1,05 dollar et atteint son plus haut niveau depuis près de deux ans face à la livre sterling, frôlant également la parité avec le franc, qu’il n’a plus connu depuis décembre 2019.

Le marché «prend conscience qu’il s’est trompé hier» en réagissant positivement aux annonces de la Fed, qui a relevé son principal taux directeur d’un demi-point de pourcentage, à une fourchette allant de 0,75% à 1%, a expliqué Christopher Vecchio, analyste de DailyFX.

Plus que la hausse du taux, les cambistes ont réagi aux commentaires du président de la Fed, Jerome Powell, qui a écarté un relèvement, lors de la prochaine réunion, de 0,75 point de pourcentage, que les opérateurs estimaient jusqu’ici certain.

«Mais les esprits posés ont repris la main» par la suite, selon Christopher Vecchio, «et tout le monde a fini par se dire que la Fed allait relever ses taux de 1,50 point (au total) lors des trois prochaines réunions et que cela restait très, très agressif.»

Les taux obligataires, qui s’était brusquement détendus mercredi, ont alors bondi. Le rendement des emprunts d’État américains à dix ans est allé jusqu’à 3,10%, pour la première fois depuis.

Pour Juan Manuel Herrera, de Scotiabank, l’avancée du dollar est en grande partie liée à un mouvement d’aversion au risque. «Le marché se disloque», a-t-il observé, agité par «l’incertitude et la volatilité».

Une certaine irrationalité s’est saisie des investisseurs, explique l’analyste. «On vend tout», y compris les obligations, qui font traditionnellement office de refuge idéal lorsque le vent se lève sur les marchés. «On se rabat sur le cash, et le dollar.»

Incertitudes géopolitique et économique, avec en toile de fond la guerre qui se poursuit en Ukraine et les confinements qui continuent de paralyser Shanghai en Chine, se sont mélangés jeudi à la posture résolue de la Fed pour faire perdre leurs repères aux opérateurs.

La livre trébuche

La livre britannique n’a pas profité de la réunion de la Banque d’Angleterre jeudi, qui a elle aussi remonté son taux, mais de seulement 0,25 point, les observateurs s’attardant également sur les prévisions pessimistes de la BoE.

«Bien que le marché ait anticipé une hausse de 0,25%, il y avait une certaine attente que la Banque d’Angleterre adopte une position plus agressive et suive l’exemple de la Réserve fédérale», a expliqué Susannah Streeter, analyste de Hargreaves Lansdown.

Le PIB britannique devrait se contracter au quatrième trimestre, a averti jeudi l’institut monétaire, qui anticipe aussi un recul de l’activité au Royaume-Uni de 0,25% pour l’ensemble de 2023 et une inflation au-dessus de 10% au quatrième trimestre.

Pour Christopher Vecchion «la Banque d’Angleterre est vraiment sortie de sa trajectoire de remontée des taux et a adopté un ton relativement plus prudent» quant à son resserrement monétaire.

L’euro, quant à lui, n’est pas aidé par la Banque centrale européenne (BCE), qui hésite toujours à remonter ses taux alors que le conflit se poursuit à ses frontières, en Ukraine.

L’économie européenne «stagne de facto», après une timide croissance de 0,2% au premier trimestre, a affirmé jeudi Fabio Panetta, membre du directoire de la BCE, dans une interview au quotidien La Stampa.

Cela «complique les choix» des gardiens de l’euro, car «un resserrement monétaire visant à contenir l’inflation finirait par freiner une croissance déjà affaiblie», prévient M. Panetta, rangé parmi les «colombes» adeptes d’une politique monétaire soutenant l’économie.

Philip Lane, chef économiste de la BCE, juge pour sa part que «le calendrier pour achever ce processus de normalisation (monétaire) est intrinsèquement incertain».

Du côté des cryptomonnaies, le bitcoin faisait les frais du manque d’appétit pour le risque du marché et chutait de 7,5% à 36’820 dollars, un plus bas depuis fin février.

Le marché finira la semaine avec les données officielles sur l’emploi américain vendredi.

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