La Banque du Japon répond aux spéculateurs par un statu quo, le yen chute

AWP

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La BoJ a maintenu son taux négatif de court terme à -0,1% et n’a pas augmenté le plafond des rendements obligataires japonais à 10 ans qu’elle tolère, alors qu’elle l’avait relevé par surprise à 0,5% le mois dernier.

Le changement attendra: la Banque du Japon (BoJ) n’a pas modifié mercredi sa politique monétaire ultra-accommodante, contrairement aux attentes de certains spéculateurs, ce qui a aussitôt fait sombrer le yen par rapport au dollar et à l’euro.

La BoJ a maintenu son taux négatif de court terme à -0,1% et n’a pas augmenté le plafond des rendements obligataires japonais à 10 ans qu’elle tolère, alors qu’elle l’avait relevé par surprise à 0,5% le mois dernier, ce qui avait ravivé les spéculations sur un prochain resserrement monétaire de sa part.

La BoJ avait assuré en décembre que cet ajustement visait uniquement à corriger des distorsions sur le marché nippon de la dette publique engendrées par sa propre politique, et ne devait pas être interprété comme le début d’un resserrement monétaire.

Mais de nombreux investisseurs doutaient de cette justification et se sont mis à spéculer sur une normalisation rapide de sa politique monétaire, qui serait plus favorable aux actifs financiers libellés en yen.

Cela a forcé la BoJ à intensifier encore davantage ses achats d’obligations publiques japonaises (JGB). Et malgré ses efforts, leurs rendements à dix ans avaient franchi sa ligne rouge de 0,5% à plusieurs reprises ces derniers jours.

«Nous pensons que le contrôle de la courbe des rendements fonctionne» et que cet outil est «viable» dans la durée, a pourtant déclaré mercredi le gouverneur de la BoJ Haruhiko Kuroda lors d’une conférence de presse.

Il a aussi estimé qu’il était encore trop tôt pour que l’ajustement de décembre porte ses fruits, et qu’il n’était «pas nécessaire» d’augmenter de nouveau le plafond des rendements à dix ans accepté par la BoJ.

Ralentissement de l’inflation en 2023

L’institution a légèrement relevé sa prévision d’inflation au Japon pour l’exercice en cours 2022/23 (qui s’achèvera le 31 mars), à 3% contre 2,9% précédemment, mais a laissé inchangée sa perspective pour 2023/24, à 1,6%.

Elle a aussi rehaussé sa prévision d’inflation pour 2024/25 à 1,8% contre 1,6% auparavant.

Mais ces nouvelles prévisions restent inférieures à l’objectif de la BoJ d’atteindre une hausse des prix stable de 2%, la raison d’être de sa politique monétaire ultra-accommodante depuis dix ans.

«Pour le moment nous ne pouvons pas prévoir quand (cet objectif, NDLR) sera atteint de manière stable et durable», a insisté mercredi M. Kuroda.

Car la hausse des prix à la consommation dans l’archipel nippon a été essentiellement stimulée l’an dernier par des facteurs externes: la flambée des prix mondiaux de l’énergie et de l’alimentation dans le sillage de la guerre en Ukraine et des sanctions internationales contre la Russie, tandis que les perspectives de croissance et de hausses de salaires au Japon restent limitées.

La BoJ a d’ailleurs revu en légère baisse sa prévision de croissance du PIB nippon en 2022/23 (1,9% contre 2% auparavant). Elle a aussi abaissé ses pronostics pour 2023/24 (1,7% contre 1,9% précédemment) comme pour 2024/25 (1,1% contre 1,5%).

Partie remise?

Sur le marché des changes, le dollar grimpait de 1,6% par rapport au yen, à 130,17 yens vers 08h00 GMT, après être monté au-delà de 131 yens dans la foulée des annonces de la BoJ. L’euro se renforçait encore plus fortement face à la devise nippone à 141,14 yens (+2%).

La chute du yen a dopé mercredi la Bourse de Tokyo, car une telle tendance de change est favorable aux valeurs exportatrices nippones: l’indice vedette Nikkei a clôturé sur un bond de 2,5%.

Quant aux rendements à dix ans des JGB, ils redescendaient à 0,42% vers 08h00 GMT alors qu’ils évoluaient au-delà de 0,5% avant les annonces de la banque centrale japonaise.

Néanmoins pour beaucoup d’observateurs, le changement de cap de la BoJ n’est que partie remise.

«Les spéculations vont persister» cette année, alors que M. Kuroda achèvera début avril son deuxième et dernier mandat à la tête de la BoJ, a prédit Takahide Kiuchi, économiste de l’institut de recherche de Nomura et ancien haut responsable de la banque centrale japonaise.

«La BoJ va continuer d’intervenir activement sur le marché des JGB dans les trimestres à venir, mais un ralentissement de l’inflation conjugué à une accalmie des rendements obligataires mondiaux devrait progressivement réduire la pression» au second semestre 2023, selon une note d’Oxford Economics.

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