Japon-USA: accord commercial en panne à cause des voitures

AWP

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Le Japon exigerait l’engagement ferme de l’administration Trump qu’elle n’infligera pas des tarifs douaniers de 25% sur ses exportations de voitures, vitales pour son économie.

Accord commercial ou déclaration de bonnes intentions? A la veille de la rencontre entre Donald Trump et le Premier ministre japonais Shinzo Abe, le scepticisme grandissait sur leur capacité à parapher un véritable traité en marge de l’Assemblée de l’ONU à New York.

Voulues par le président américain pour rééquilibrer les échanges entre les Etats-Unis et le Japon au bénéfice notamment des agriculteurs américains, les négociations finales achopperaient sur le délicat dossier automobile, selon les médias japonais.

En échange d’une baisse sensible des droits de douane frappant les produits agricoles américains, dont le boeuf et le porc, le Japon exigerait l’engagement ferme de l’administration Trump qu’elle n’infligera pas des tarifs douaniers de 25% sur ses exportations de voitures, vitales pour son économie.

L’an passé, Washington a accusé avec Tokyo un déficit commercial de 56,8 milliards de dollars. Le Japon a notamment exporté pour 51 milliards de dollars de voitures, selon les données du représentant américain au Commerce (USTR).

Pour l’heure, l’administration Trump est restée muette sur ses intentions. Le président républicain, qui brigue un second mandat, s’est donné jusqu’au 17 novembre pour décider d’imposer ou non de nouveaux tarifs douaniers sur l’automobile non seulement en provenance du Japon mais encore des pays de l’Union européenne.

A la tribune de l’ONU, M. Trump n’a fait qu’une allusion en passant au traité avec le Japon: «Demain je retrouverai le Premier ministre du Japon (...) pour finaliser un accord commercial».

Agriculteurs

Les négociations avaient commencé en avril. Et, fin août, Donald Trump avait annoncé, lors du sommet du G7 en France, la conclusion d’un accord «de principe» entre les deux pays, avec le souhait que le texte soit formellement paraphé lors de l’Assemblée générale des Nations Unies qui se tient cette semaine.

«S’agissant des négociations commerciales, nous avons terminé toutes les négociations aujourd’hui. C’est terminé», a affirmé lundi Toshimitsu Motegi le ministre japonais des Affaires étrangères après une réunion avec l’USTR Robert Lighthizer.

«Je pense que nous allons avoir une belle cérémonie» lors de la réunion de mercredi avec Donald Trump et ses ministres, à la télévision japonaise. L’ancien ministre de l’économie, au coeur des négociations commerciales, n’a toutefois pas évoqué la signature d’un accord.

Selon la presse japonaise citant des sources proches du dossier, les termes du traité seraient toujours en discussion, soumis à l’examen minutieux des avocats des deux parties.

Le New York Times, citant aussi des sources proches du dossier, ajoute que Tokyo souhaite inclure en particulier une «clause crépusculaire» («sunset clause») qui invaliderait l’accord et tous les avantages accordés aux producteurs agricoles américains si Donald Trump donnait suite à sa menace d’imposer des tarifs douaniers punitifs sur les voitures.

Faute d’un accord, les dirigeants pourraient annoncer qu’ils continuent à oeuvrer à la conclusion d’un accord dans les prochaines semaines, poursuit le quotidien américain.

Lundi, la porte-parole de l’exécutif américain avait indiqué que les tractations commerciales devraient aboutir à la signature d’un texte «dans les deux jours à venir», lors d’un entretien sur Fox Business.

Cet accord est particulièrement attendu par les agriculteurs et éleveurs américains.

L’an passé, les éleveurs de porcs, très dépendants des marchés étrangers où ils exportent 25% de leur production, ont vendu pour 1,6 milliard de dollars au Japon.

Les consommateurs japonais ont acheté pour plus de 2 milliards de dollars de boeuf américain, ce qui représente environ un quart des exportations totales de boeuf américain.

Fin août, la fédération des producteurs de boeuf (NCBA) avait évoqué la suppression des droits de douane «massifs» de 38,5% sur le boeuf américain qui permettraient de rendre attractives les exportations américaines.

La première exportation agricole vers le Japon reste toutefois le maïs avec 2,8 milliards de dollars en 2018.

Cet accord «est très important pour nous», a souligné à l’AFP Veronica Nigh, économiste au sein de la principale fédération agricole, l’American Farm Bureau Federation alors que les producteurs de boeuf et de porc sont fragilisés par les récents accords de libre-échange signés par le Canada et l’Union européenne avec le Japon.

Ottawa est en effet partenaire de Tokyo au sein de l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (le nouveau TPP) entré en vigueur en décembre 2018 que Donald Trump a rejeté, au grand dam des agriculteurs.

L’accord de partenariat économique entre l’UE et le Japon est, lui, mis en oeuvre depuis le 1er février 2019.

Veronica Nigh souligne que sans accord avec le Japon, la détérioration des parts de marché des éleveurs américains sur le marché japonais pourrait être très rapide.

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