2020: année à risque pour les actions américaines

Jocelyn Jovène, Morningstar

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Le rebond de 2019 s’est fait essentiellement sur une appréciation des multiples. Il faudrait que les fondamentaux reprennent le relais, ce qui semble délicat dans une économie qui décélère.

Les actions américaines pourront-elles répéter «l’exploit» de 2019? Pas sûr au regard de l’environnement économique. Il faudra sans doute compter une nouvelle fois sur l’action de la Fed, qui, depuis le rebond des marchés entamé en 2009, a été un moteur important de la performance de la Bourse américaine.

L’exercice de prévision pour 2020 est rendu d’autant plus délicat par le rebond de Wall Street en fin d’année dernière. Celui-ci a rendu caducs la pluplart des objectifs des brokers à 12 mois, tous publiés entre fin novembre et début décembre.

Ces derniers sont aujourd’hui contraints de revoir leurs objectifs à la hausse dans un contexte qui est devenu en quelques jours plus incertain.

En 2020, l’attention des investisseurs sera centrée sur la croissance de l’économie, attendue en décélération mais peut-être pas en récession, et sur l’évolution des profits des entreprises, qui devraient progresser très modestement cette année, tout comme l’an dernier – en raison d’une part, d’une économie moins dynamique et d’autre part, de l’augmentation des coûts salariaux.

Parmi les facteurs d’incertitude ou de prudence, on peut citer les perspectives économiques (PMI manufacturier à 47,2, tandis que le PMI non-manufacturier se situe à 53,9; inflation modérée à 2,1% et 1,6% pour l’inflation «core»; statistiques de l’emploi bien orientée, mais ventes de détail en ralentissement à 3,3%; utilisation des capacités de production modérée à 77,3% et repli des dépenses d’investissement hors transport à -0,3%, en territoire négatif depuis l’été 2019).

Il faudra toutefois compter avec la Fed et, nouveauté, avec les élections présidentielles américaines de novembre. Ces éléments impacteront nécessairement le sentiment des investisseurs, et par ce biais l’évolution des multiples de valorisation.

Qu’espérer pour le S&P qui est sur des plus hauts historiques? Pour évaluer sa tendance, il faut sans doute prendre la performance de 2019 avec des pincettes. En apparence, elle est spectactulaire: +30,7% dividendes inclus en dollars; +33,1% en euros.

Mais il ne faut pas oublier que le quatrième trimestre 2018 avait été marqué par une brutale correction boursière. Si l’on prend comme point de référence fin septembre 2018, soit avant le krach du quatrième trimestre 2018, l’indice S&P 500 n’affiche qu’une progression de 12,9% (dividendes inclus en dollars) sur 15 mois.

En outre, comme souligné précédemment, l’essentiel du rebond est venu de l’expansion des multiples de bénéfice, passés de 14,4x fin 2018 à 18,3x fin 2019.

Contribution à l’évolution annuelle de l’indice S&P 500

Source: Morningstar

D’après les stratégistes d’UBS, dans une note datée du 8 janvier, le gros du rebond des marchés dans le monde est à mettre sur le compte des banques centrales (10 points de pourcentage); l’apaisement des craintes quant à la croissance mondiale expliquerait 6 points de pourcentage de la hausse, et 3 points additionnels viendraient de la réduction de l’incertitude politique.

Pour 2020, les données sur la croissance économique mondiale, notamment américaine et chinoise, seront capitales (d’où l’importance d’un accord commercial entre les Etats-Unis et la Chine). Or à ce stade, les prévisions vont plutôt dans le sens d’une décélération (autour de 1,5% aux Etats-Unis après 2,1% en 2019).

Outre la croissance économique américaine, l’évolution de la courbe des taux, l’action de la Fed, le sentiment du consommateur américain (toujours en assez bonne forme), la dynamique du marché de l’emploi et l’impact de l’inflation salariale sur l’évolution des prix seront des facteurs à suivre avec attention.

Le point de vue de Morningstar

Sur la base des estimations de juste valeur de près de 700 sociétés cotées aux Etats-Unis et suivies par les analystes de Morningstar, la prime de valorisation (cours / juste valeur) est de 6% en moyenne. Elle va d’une prime de 16% dans le secteur de la technologie en moyenne à une décote de 10% dans le secteur de l’énergie (seul secteur à se traiter avec une décote actuellement).

Source: Morningstar Direct, données au 8 janvier 2020.

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