Les infrastructures ont l’avantage de leur caractère défensif

Yves Hulmann

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Pour Jim Lydotes, gérant de fonds chez BNY Mellon IM, cette thématique inclut, au sens large, aussi les télécoms et la santé.

A la tête de deux fonds infrastructures de BNY Mellon et de The Boston Company (TBCAM), Jim Lydotes, qui est Lead Portfolio Manager Global Infrastructure auprès de The Boston Company (une marque de BNY Mellon IM), met en perspective les atouts de ce secteur. Selon le spécialiste, les infrastructures offrent d’excellentes perspectives de rendements ajustés des risques, complétées par une grande diversification si l’on considère ce domaine au sens large. Explications.

Quels sont les principaux moteurs de croissance dans le domaine des infrastructures actuellement? 

Les infrastructures sont un domaine extrêmement vaste. C’est un thème qui englobe de nombreux autres thèmes. Il inclut bien sûr le segment le plus visible des sociétés actives dans les services aux collectivités («utilities») ou des sociétés qui gèrent les péages routiers par exemple. Au sens plus large, il comprend aussi ce que l’on appelle les «infrastructures sociales», incluant par exemple aussi les exploitants d’équipements de télécommunications.

Pourquoi les télécoms feraient-elles partie des infrastructures? 

C’est le cas pour les sociétés qui équipent et entretiennent les réseaux de base, comme la fibre optique par exemple. Le rôle de ces entreprises deviendra même toujours plus crucial au fur et à mesure que de nouveaux services dépendront d’un accès absolument fiable à un réseau de télécommunication. Jusqu’à présent, les sociétés télécoms ont investi toujours davantage dans ce domaine tandis que les prix ont, eux, à l’inverse constamment baissé. C’était un environnement fantastique pour les consommateurs mais terrible pour les entreprises! Maintenant que l’on passe de la 4G à la 5G, les réseaux de télécommunications ne serviront plus seulement à téléphoner ou à surfer sur Internet avec son smartphone mais ils serviront aussi de base au fonctionnement de l’Internet des objets (IoT) ou encore à la conduite des véhicules autonomes. Les compagnies actives dans les télécoms devront dès lors fournir des services absolument fiables et auront davantage de pouvoir pour négocier les prix, un meilleur «pricing power».

«Il y aura à l’avenir d’excellentes opportunités
d’investissement aux Etats-Unis.»
Votre fonds investit de manière globale: quelles régions sont actuellement sous-pondérées ou surpondérées? 

C’est effectivement l'un des grands avantages de notre fonds de pouvoir investir de manière réellement globale. Cela nous permet de rééquilibrer notre allocation d’actifs en fonction du potentiel de développement des infrastructures dans différentes régions du monde, soit, à l'heure actuelle, essentiellement aux Etats-Unis et en Europe. En Asie, nous avions investi plus de 30% de nos avoirs en 2011 alors que cette part n’atteint désormais plus que 3%.

Pourquoi êtes-vous devenu aussi prudent concernant l’Asie? 

Il y a sept ans, il y avait d’excellentes opportunités d’investissement dans les infrastructures en Asie. Maintenant, on observe une décélération de la croissance. De plus, les sociétés asiatiques actives dans ce domaine offrent relativement moins de valeur par rapport aux marchés de l’UE et des Etats-Unis.

Y a-t-il des endroits où l’on peut craindre une situation de surchauffe dans les infrastructures? 

C’est un secteur qui peut connaître d’importantes divergences d’un point de vue régional. En Australie, par exemple, il y a déjà eu un très grand nombre de privatisations dans ce domaine. Je serais plutôt prudent concernant les perspectives de ce domaine en Australie. Aux Etats-Unis, en revanche, je pense qu’il y aura à l’avenir d’excellentes opportunités d’investissement, compte tenu notamment de certains projets de privatisation.

Le vieillissement des infrastructures aux Etats-Unis est un débat récurrent depuis de nombreuses années. Anticipez-vous de nouvelles impulsions dans ce domaine outre-Atlantique? 

Je reste prudent à ce sujet: je ne suis pas sûr à quel point nous sommes proches d’une volonté de réel renouvellement des infrastructures aux Etats-Unis. Ces dernières années, aussi bien les Républicains que les Démocrates ont souvent répété à l’unisson qu’il est nécessaire d’investir plus dans les infrastructures, etc. – sans qu’il n’y ait de réel résultat ensuite. Malgré tout, il y a des opportunités d’investissement importants dans plusieurs domaines: notamment, dans les aéroports où plusieurs projets de privatisation sont en cours. Beaucoup de gens ont l’habitude de dire que les Etats-Unis sont un pays développé mais avec des infrastructures du tiers monde. Donc, oui, il y aura à terme d’importantes opportunités d’investissement aux Etats-Unis – mais le processus ne va pas forcément démarrer tout de suite.

«Certains pays comme la Chine investissent beaucoup dans les infrastructures
lors des périodes de ralentissement de l’économie.»
Vous avez évoqué également les «infrastructures sociales». Cela concerne-t-il aussi le domaine de la santé?

Oui, bien sûr. Avec l’arrivée massive des «babyboomers» à l’âge de la retraite, il est nécessaire d’avoir de nouveaux équipements non seulement dans le domaine de la santé mais aussi de construire des logements adaptés aux besoins des seniors. L’une des plus importantes positions dans notre fonds, la société immobilière américaine Omega Healthcare Investors, est typiquement active dans ce segment.

Comment réagissent les actions des sociétés faisant partie des infrastructures en cas de récession? 

C’est aussi un aspect qui parle en faveur du secteur des infrastructures. En effet, on observe que certains pays comme la Chine investissent beaucoup dans les infrastructures lors des périodes de ralentissement de l’économie. C’est une activité qui a des caractéristiques anticycliques.

Quel est le degré de corrélation des actions liées aux infrastructures avec celui des marchés en général?

Les actions liées aux infrastructures ont une volatilité inférieure. On estime leur corrélation par rapport au MSCI aux environs de 65%. Elles ont donc une caractéristique clairement défensive.

Vous insistez beaucoup sur la composante dividendes de votre fonds. Les actions en infrastructure ne sont toutefois pas les seules à fournir des dividendes attrayants actuellement. 

Les investissements dans les infrastructures génèrent des flux de revenus à la fois réguliers et prévisibles. Alors que le rendement des dividendes se situe en moyenne à 2% pour les actions globales, il s’élève à 4% pour les actions liées au secteur des infrastructures et il atteint même 6% dans le cas de notre fonds.

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