La BCGE, vers un nouveau leader bancaire en Suisse

Anne Barrat

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Croissance, tel a été le maître mot de la BCGE en 2019. Mode d’emploi avec Blaise Goetschin.

Chiffre d’affaires +2,7%, bénéfice net +6,2%, encours +13,9%, fonds propres +6,2%, dividende +10%. De très bons chiffres que commente Blaise Goetschin, CEO de la Banque Cantonale de Genève.

Comment les résultats de l’année 2019 s’inscrivent et renforcent vos objectifs?

La croissance de près de 3% du chiffre d’affaires qu’affiche notre entreprise, pour atteindre un niveau de 420,3 millions de francs (409,4 en 2018), la positionne dans le top 8 (premier tiers) des banques cantonales suisses. Par-delà l’ampleur des chiffres, notre objectif est de maintenir des fondamentaux qui soient solides, qui résistent bien, à un environnement économique et réglementaire contraignant ¬ le niveau négatif des taux d’intérêt, LSFin, exigences de fonds propres liées à Bâle III, volet anticyclique de 2012. Cette santé robuste se mesure à l’aune de la double croissance opérationnelle et du bilan, qui toutes deux reflètent la clé de notre succès: la confiance de nos clients. Un succès qui s’explique notamment par la diversification:

  • organique – notre modèle d’affaires de banque universelle profite à nos métiers clés: prêts hypothécaires stables hors effets non-récurrents, commissions en hausse de 3,2%, part des revenus en dollars en euros en hausse de 0,7% – ; 
  • géographique  –extension de nos activités sur l’ensemble de la Suisse et poursuite de l’internationalisation – ;
  • externe, à travers des acquisitions qui étayent nos choix stratégiques. 

Toutes les conditions sont réunies pour placer la BCGE en leader parmi les banques universelles helvétiques, alors même qu’elle a renforcé ses fonds propres avec un emprunt AT1 de 135 millions en 2019 et continue de rembourser les intérêts liés au plan de sauvetage mis en place par le Conseil d’Etat selon le mécanisme de remboursement prévu. 

«Nos principaux chantiers en 2019, qui continueront en 2020, ont concerné
la réponse à LSFin et le développement de l’asset management.»
Quels sont les principaux défis que vous avez rencontrés en 2019? Quid de 2020?

Faut-il revenir sur l’impact délétère sur nos marges des taux d’intérêt négatifs, que nous nous efforçons encore de ne pas répercuter sur nos clients (jusqu’à 3 millions de francs de dépôt)? Un exemple simple sur ce sujet: les 75 points de base que coûtent les taux de la BNS font passer de 1,4% à 0,95% notre marge sur les 11,1 milliards de francs de créances hypothécaires que nous avons octroyées en 2019. Un manque à gagner de quelque 44 millions de francs. Ce défi, ce n’est pas seulement le nôtre, mais celui de toutes les banques suisses, qui bénéficient, a contrario, de l’attractivité du franc fort. Un avantage à manier avec intelligence et subtilité: le franc est fort, mais vulnérable car son périmètre est réduit – petits territoire, population et PIB. Par conséquent, nous conseillons vivement à nos clients de privilégier une diversification monétaire de leur portefeuille. Cela étant dit, nos principaux chantiers en 2019, qui continueront en 2020, ont concerné la réponse à LSFin et le développement de l’asset management. Sur le premier point, la philosophie de la banque en matière de private banking repose sur le mandat discrétionnaire. Cette approche a déjà séduit une grande partie de nos clients de la banque privée. 4'000 d’entre eux ont opté pour cette formule qui est celle que nous souhaitons généraliser. Ce qui m’amène naturellement au second point, nos efforts pour développer notre offre d’asset management avec un objectif clair: atteindre une taille critique en Suisse. C’est dans cet esprit que nous avons fait l’acquisition de Loyal Finance AG, qui nous permet non seulement d’accroitre notre masse sous gestion (de 26,7 milliards de francs en 2018 à 30,4 milliards en 2019), mais aussi et surtout d’étoffer nos expertises en gestion d’actifs, avec la création d’un centre d’excellence de fixed income à Zurich, les actions étant gérées à Genève.

«Notre devise ‘Je connais mon banquier’
est au cœur de notre stratégie digitale.»
Les banques suisses sont-elles en retard dans la digitalisation comme le dit une récente étude de Standard & Poors?

Je serais à la fois prudent et nuancé dans ma réponse. Prudent parce que, si l’on s’en tient au taux de pénétration du ebanking («netbanking» chez BCGE), il atteint 92%. A contrario seulement 6,9% de nos clients utilisent leur natel pour effectuer des paiements, un chiffre certes en hausse (4,8% en 2018) mais modeste, qui reflète la situation contrastée de leurs attentes en la matière. Nuancé, d’une part parce que la capacité de gérer ses comptes bancaires et son patrimoine sur internet doit rester un choix et non une obligation pour nos clients. D’autre part parce qu’il n’existe pas qu’une seule approche de la digitalisation, qui se veut disruptive et n’est pas forcément adaptée aux besoins des clients, ni de la gestion interne. Une alternative, par intégration, permet d’importer des pans de digitalisation pour simplifier des aspects précis de gestion, le forex par exemple. Je dois rappeler ici que notre devise à la BCGE est: «Je connais mon banquier». Cette devise est au cœur de notre stratégie digitale: donner le choix à nos clients de tout faire sur notre plateforme de netbanking, y compris des demandes de prêt hypothécaire ou de garantie de loyer, qui ne prennent que 15 minutes au lieu d’une heure et demie naguère. Notre philosophie en matière digitale consiste à donner tous les moyens d’une banque contactless à nos clients – qui s’avèrerait un avantage décisif en cas, par exemple, d’avancées du Covid19, un sujet d’actualité – sans pour autant les contraindre ni les priver de l’opportunité de parler à leur conseiller de proximité.

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