Décryptage des signaux comportementaux

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Dans le cas des dix plus grandes faillites, les dirigeants n’étaient plus actionnaires, explique David Mellul de Varenne Capital Partners.

Présente en Suisse depuis 8 ans, Varenne Capital Partners est une société de gestion de portefeuilles qui développe et associe quatre moteurs de performance: Long Actions, Short Actions, Situations Spéciales et Couvertures Macro. Point sur quelques aspects méthodologiques avec le directeur général David Mellul, de passage à Genève lors de la conférence trimestrielle réservée aux investisseurs,

En quoi la façon d’investir de Varenne Capital se distingue-t-elle des autres gestionnaires d’actifs?

Notre proposition de gestion repose sur quatre moteurs de performance dont une stratégie longue actions et des stratégies de décorrélation et de couverture contre les dégradations de l’environnement. Nous ne déployons pas les poches «short» pour couvrir des titres longs mais ces positions vendeuses ont bien un objectif de performance. Au sein de chacune de nos stratégies, nous nous distinguons avec des portefeuilles très concentrés. Par exemple, nous n’avons que 25 positions de conviction dans la poche actions des fonds UCITS et 10 à 15 pour nos fonds FIA (non UCITS). Ce niveau de concentration est la résultante de notre méthodologie discriminante de sélection de titres.

Avec près de six millions de transactions dans notre base de données,
nous créons des grilles de lecture pour identifier les signaux anormaux.
Dans vos stratégies short, comment identifiez-vous les imperfections de marché?

Nous travaillons avec des screening fondamentaux et comportementaux. D’un côté, nous recherchons les sociétés avec de faibles niveaux de marges et de trésorerie ainsi qu’un endettement élevé. De l’autre, nous nous intéressons aux signaux comportementaux du marché. Les publications des transactions des dirigeants au capital de leurs entreprises (obligation légale) sont collectées, stockées et analysées. Cela permet de détecter, via des grilles d’interprétation automatisées, des entreprises au capital desquelles les mouvements des dirigeants paraissent anormaux. En complément du screening fondamental, ce screening comportemental alimente l’équipe en opportunités d’investissement à approfondir en déployant une analyse fondamentale. Avec près de six millions de transactions dans notre base de données, nous créons des grilles de lecture pour identifier les signaux anormaux.

Quels sont ces signaux anormaux?

Dans le cas de dix des plus grandes faillites de sociétés, les dirigeants n’étaient plus actionnaires.  Ainsi les ventes massives lorsque les cours sont en très forte baisse peuvent être d’excellents signaux, gardant à l’esprit que la vente peut toujours être due à une motivation autre que la dégradation fondamentale du titre. C’est précisément ce que l’équipe doit comprendre.

L’analyse fondamentale étant votre première approche, avez-vous un exemple de stratégie d'entreprise non maîtrisée?

Le groupe alimentaire suisse Arizta, dont les marges se sont dégradées suite à des acquisitions ratées, offrait un catalogue de produit Business to Business comportant trop de références et des doublons. L’illisibilité de son catalogue a fait fuir une partie de sa clientèle. Puis la société a décidé d’opérer sur le segment du Business to Consumer et s’est retrouvée en compétition directe avec ses clients restant...

Les Etats-Unis ont été les plus actifs
et les activités en Europe ont baissé.
Vous utilisez également des stratégies de situations spéciales. L’année 2019 a-t-elle été riche en fusions et acquisitions malgré les barrières protectionnistes américaines?

Oui, mais derrière cette activité soutenue nous avons effectivement constaté que les Etats-Unis ont été les plus actifs et que les activités en Europe ont faibli. Nous avons généré entre 0,7% et 0,85% sur cette gamme de stratégies pour une volatilité très faible sur les opérations car nous connaissons ces nouveaux facteurs de risque apparus avec l’entrée de Trump à la Maison Blanche. Trump qui préside le CFIUS a de ce fait la mainmise sur toutes les transactions d’acteurs étrangers sur des sociétés américaines. Il a ainsi bloqué et dissuadé un nombre important d’opérations de fusac. Cette situation crée également un décalage sur le timing qui complique la gestion des opérations dont la durée de vie entre l’annonce et le paiement varient de 4 mois à 18 mois.

Quelle est la durée moyenne de vos stratégies de fusions et acquisitions?

Notre durée moyenne sur cette stratégie est de 2 mois et demi car nous intervenons postérieurement à la publication de la documentation légale qui prend jusqu’à deux mois après l’annonce. Nous ne nous positionnons qu’après l’analyse de l’ensemble des facteurs de risques propres à chaque situation spéciale.