Chasse au rendement

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Pour la fin de cycle, J.P. Morgan privilégie les actions à haut dividende. Entretien avec le spécialiste des actions européennes Karsten Stroh.

Lors du J.P. Morgan Asset Management Media tour à Londres la semaine dernière, les gestionnaires ont déclaré favoriser les stratégies de portage. Une occasion pour faire le point sur les actions européennes à haut dividende qui s’inscrivent dans la chasse au rendement. Karsten Stroh, Senior Product Specialist des actions européennes chez J.P. Morgan Asset Management, estime que «les investisseurs focalisent trop sur les risques et ne recherchent pas assez les opportunités particulièrement dans une perspective de rendement au sein de la classe actions. Or, la demande pour les revenus s’accroit et cette tendance sera durable». Entretien.

Actuellement, vous privilégiez les actions à haut dividende. Mais en fin de cycle, les entreprises ne pourraient-elles pas être tentées de réduire leurs dividendes?

Il est vrai que si nous allons vers une récession, beaucoup de sociétés vont abaisser leurs dividendes. Mais si les entreprises réduisent les dividendes alors que les cours des actions baissent également, les rendements des dividendes resteront intéressants. Cela dit, en Europe, les sociétés ne seront peut-être pas amenées à les réduire car leurs bilans sont globalement sains. Aussi, le volume de rachats de titres (plus élevé que les émissions de nouvelles actions) prouve que les sociétés sont actuellement toujours confiantes.

«Nous nous intéressons uniquement
aux sociétés qui payent des dividendes réellement.»
Comment procédez-vous lors de la sélection d’actions à haut rendement?

Nous composons notre univers d’investissement avec les actions comprises dans le groupe des 30% offrant les dividendes les plus élevés du marché européen. Nous nous intéressons uniquement aux sociétés qui payent des dividendes réellement et excluons de ce fait les actions de croissance qui pourraient verser de gros dividendes dans environ 5 ans. Inversement, certaines entreprises offrent aujourd’hui des dividendes généreux, mais ces dividendes ne seront vraisemblablement pas durables. Ce sont des pièges à rendement que nous excluons également.

Comme identifiez-vous les pièges à rendement?

Nous pouvons analyser la durabilité du ratio de couverture du dividende; les cashflows et les revenus pourront-ils couvrir les dividendes avec le temps? Si ces ratios ne sont pas dans le vert, cela indique que la société devra probablement diminuer son dividende. Parallèlement, nous nous intéressons aussi à ce que le marché nous dit sur le momentum de l’action et sur la tendance des revenus.

Quel secteur (offrant aujourd’hui de généreux dividendes) est un piège à rendement?

Un grand nombre de valeurs bancaires paient des dividendes très attrayants autour de 6%, mais elles ne pourront très probablement pas les maintenir. Les taux d’intérêt très bas ont mis le secteur sous pression et cela s’observe dans leurs profits. En l’absence d’une amélioration de ces derniers, quels cashflows arriveront-elles à générer pour maintenir leurs dividendes? En 2005, alors que les banques étaient en forme elles faisaient partie intégrante de notre univers. Mais aujourd’hui, bien qu’elles soient toujours perçues comme des actions à haut dividende par les investisseurs, dans beaucoup des cas nous les considérons actuellement comme des pièges à rendement.

«Nous surpondérons le secteur de l’assurance
dont le modèle d’affaire est très différent des banques.»
Vous détenez peu de titres du secteur de l’alimentation. Pour quelle raison?

Quelques investisseurs détiennent beaucoup de valeurs du secteur de l’alimentation comme Nestlé, réputées pour être des payeurs de dividendes réguliers. Beaucoup des ces sociétés sont bien établies et jouissent de bons cashflows, mais leurs dividendes ne sont simplement pas suffisamment élevés pour les prendre en compte dans notre univers.

Quelle sont vos secteurs favoris?

Nous surpondérons le secteur de l’assurance dont le modèle d’affaire est très différent des banques. Nous avons continuellement surpondéré ce secteur qui a constamment maintenu ses dividendes. Aussi, nous aimons les fournisseurs d’énergie qui reste un pari classique. Les débats autour de l’ESG ont puni certaines entreprises qui ont déjà mis en place les changements nécessaires.

De votre côté, comment intégrez-vous les critères ESG dans votre processus de sélection d’actions?

Nous effectuons nos propres analyses ESG mais nous nous intéressons également à certains signaux de marché. Au final, les données quantitatives produisent des scores que nous ajustons selon les conclusions de nos analyses fondamentales.