Tidjane Thiam quitte la direction de Credit Suisse

AWP

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Thomas Gottstein, l'actuel responsable de la filiale helvétique, remplacera M. Thiam à la direction générale de la banque. L'action clôture en hausse.

Tidjane Thiam n’a finalement pas résisté à l’affaire des filatures chez Credit Suisse. Un peu plus de quatre mois après les premières révélations dans la presse, le directeur général du deuxième groupe bancaire suisse va quitter ses fonctions, non sans clamer son innocence dans ce dossier.

Thomas Gottstein, qui dirige depuis 2016 la filiale helvétique de Credit Suisse, remplacera M. Thiam dans ses fonctions de directeur général du groupe bancaire zurichois, a indiqué l’établissement vendredi dans un communiqué. André Helfenstein, jusqu’à présent en charge des clients institutionnels, prend la succession de M. Gottstein à la tête de l’entité suisse.

Lors d’une réunion jeudi, le conseil d’administration de la banque aux deux voiles a accepté «à l’unanimité» la démission de M. Thiam au 14 février. Il était arrivé mi-2015 de l’assureur britannique Prudential pour redresser une banque en perte de vitesse.

«Pas de lutte de pouvoir»

Le président Urs Rohner, cible de vives critiques d’actionnaires, a indiqué que M. Thiam avait «énormément contribué (au développement) de Credit Suisse». «C’est grâce à lui que la banque est de nouveau solide et a renoué avec les bénéfices», a-t-il ajouté.

Il a assuré, dans un entretien à la radio alémanique SRF, qu’«il n’y a jamais eu de lutte de pouvoir» entre lui et M. Thiam.

Ce départ intervient alors que le plus important actionnaire de Credit Suisse, le gestionnaire d’actifs américain Harris Associates qui détient 8,42% de la banque, avait confirmé mercredi son soutien au Franco-ivoirien, de même que Silchester International Investors, propriétaire de 3,3% du groupe zurichois.

David Herro, associé et vice-président de Harris Associates, avait menacé de ne pas réélire le président si un changement devait intervenir à la direction générale de l’établissement. M. Herro avait exigé de l’organe de surveillance et de M. Rohner qu’ils expriment publiquement leur confiance en Tidjane Thiam. La fondation Ethos avait appelé à la démission d’Urs Rohner.

Le président du conseil d’administration est néanmoins venu apporter son soutien au patron sortant. Sous la direction de Tidjane Thiam, le groupe de la Paradeplatz «a effectué un virage stratégique, renforcé ses fonds propres (et) réduit ses coûts et les risques», a-t-il énuméré.

Fronde de certains actionnaires

L’organe de surveillance a par ailleurs exprimé «sa pleine confiance» en M. Rohner, qui va poursuivre son mandat comme précédemment annoncé jusqu’en avril 2021, a souligné l’administrateur indépendant Severin Schwan. Urs Rohner a dit à SRF «ne pas exclure» que certains actionnaires se tournent contre lui, «ce qui est le droit» de chacun d’entre eux.

Le président a cependant assuré dialoguer avec tous les actionnaires. «Beaucoup m’ont confirmé qu’ils allaient soutenir les choix du conseil d’administration». Revenant sur l’affaire des filatures, notamment de l’ancien banquier star Iqbal Khan, M. Thiam a pour sa part répété n’avoir eu «aucune connaissance» de ces agissements qui ont «nui à Credit Suisse et provoqué incertitudes et souffrance».

«Je regrette ce qui s’est passé, cela n’aurait jamais dû arriver», a ajouté le Franco-ivoirien. Le directeur général sortant présentera encore jeudi les résultats annuels de la banque avant de quitter son poste.

Pas de problème culturel

Quant à Thomas Gottstein, il a assuré à Reuters qu’il n’y avait «pas de problème culturel» au sein de l’établissement. «Nous avons appris un certain nombre de choses de cette affaire, des erreurs ont été commises», a-t-il admis, soulignant que les filatures ne devraient pas faire partie des méthodes employées par le groupe.

La banque aux deux voiles est sous pression depuis septembre dernier lorsqu’on a appris qu’elle avait fait suivre son ancien banquier star Iqbal Khan, passé chez le concurrent UBS, par des détectives privés. Après enquête interne, l’établissement a exonéré M. Thiam de toute responsabilité, mais un second cas de surveillance a été dévoilé par la suite.

Le gendarme des marchés financiers Finma examine de son côté s’il y a eu des manquements au contrôle au sein de la direction de la banque. Selon le résultat de l’enquête, le régulateur pourrait exiger des changements à la tête du groupe. Une enquête pénale a également été ouverte par le procureur zurichois dans le cadre de ce dossier.

La responsabilité de la filature d’Iqbal Khan a été attribuée au directeur opérationnel Pierre-Olivier Bouée ainsi qu’au chef de la sécurité de la banque Remo Boccali qui a depuis démissionné. L’affaire des filatures s’est également soldée par le suicide de l’intermédiaire entre la banque et la société de détectives privés.

Après avoir été lourdement pénalisé par les investisseurs, le titre Credit Suisse s'est peu à peu repris en cours de séance pour clôturer en hausse de 0,23% à 12,81 francs. L'indice vedette SMI a pour sa part achevé la séance sur un repli de 0,10%.

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